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MADAGASCAR : Entretien avec Elodie Selamanana,architecte consultante au comité de développement de la ville de Tamatave

Entretien avec  Malalatiana Elodie Selamanana   ARCHITECTE Diplômée d État Diplômée de l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble en France. Planificatrice Urbaine et Territoriale Portrait Architecte consultante au comité de Développement de la Ville de Tamatave. MADAGASCAR. Elodie  Selamanana est Chargée de

Entretien avec  Malalatiana Elodie Selamanana   ARCHITECTE Diplômée d État

Diplômée de lEcole Nationale Supérieure dArchitecture de Grenoble en France.

Planificatrice Urbaine et Territoriale

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Portrait

Architecte consultante au comité de Développement de la Ville de Tamatave. MADAGASCAR.

Elodie  Selamanana est Chargée de l’élaboration du Master Plan de la métropole de Tamatave.

Née en 1990 à Vatomandry (Région Est de Madagascar), SELAMANANA Malalatiana Elodie a fait ses débuts à l’école primaire à Tamatave, puis au Lycée Privé Catholique Stella Maris où elle a décroché le brevet de collège et le baccalauréat. « On peut dire que je n’ai pas eu un parcours difficile. En 2006, en classe de Première Scientifique, j’ai passé mon premier Bac (Bac Littéraire) en tant que candidat libre et je l’ai eu avec une mention Assez Bien. En 2007, j’ai obtenu mon Bac Scientifique avec une mention Bien », raconte-t-elle.

La jeune architecte a dû, ensuite, attendre un an pour entrer à l’école d’architecture de Grenoble en France car elle était« en retard pour la rentrée 2007-2008. J’ai alors suivi des cours en économie à l’Université de Tamatave en attendant ». En Septembre 2008, elle entre à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble (ENSAG). « J’y ai passé 5 années de stress permanent, de nuit blanche, de charrette… 5 dures années. Mais je suis devenue l’architecte que je suis grâce à tout cela et j’en suis particulièrement fière ».

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Toamasina qui veut dire c’est salé (ou Tamatave) est le premier port de Madagascar et la 2ème ville du pays. La ville se situe sur la côte est à 370 km de la capitale.

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Formation

  1. Comment en êtes-vous arrivé ce choix de profession?
  2. Pourquoi j’ai choisi l’architecture? A la base, je voulais devenir ingénieur en Bâtiment et Travaux Publics (BTP).J’ai toujours été attirée par le domaine de la construction : Petite, mon rêve était de construire ma propre maison par moi même. Alors, peut-être que c’est aussi dans la famille, la passion de construire car j’ai un grand-père et un oncle ingénieurs en BTP….A Madagascar, on ne connaissait pas encore le métier d’architecte. Pour construire, on fait appel à des ingénieurs ou à des entrepreneurs de construction. Un jour, j’étais en classe de Terminale en 2007, j’ai vu un reportage à la télé sur la construction d’un Hôtel 5 étoiles au Bahamas. Le mot “architecte” revenait souvent : “l’architecte a conçu”, “l’architecte a pensé jusqu’aux petits détails”, “l’architecte a dessiné”. Enfin, le fameux architecte est apparu dans ce reportage, interviewé sur les étapes de la construction. C’est là que j’ai compris qu’il existe plusieurs métier dans le domaine de la construction et que le métier de ce monsieur dit “architecte” me plaisait vraiment. Je voulais devenir architecte.
  3. Quels sont les grands principes sur lesquels on vous a formé?

A l’ENSAG, on nous a formés à la compréhension des contextes et des imbrications d’échelle (spatiale et temporelle), à l’innovation dans la pensée conceptuelle et à la représentation graphique comme un mode de communication de projet par excellence. On nous a appris à devenir des architectes contemporains, responsables, soucieux du confort pour tous.

  1. Au cours de votre formation, aviez-vous eu des modèles d’architectes ou aviez-vous fait des rencontres qui ont orienté ou influencé vos choix aujourd’hui?

Comme tous les étudiants passionnés par son domaine d’études, bien sûr, j’ai eu quelques architectes références notamment Christian De Portzamparc – architecte-urbaniste, Herzog et De Meuron – architectes, et comme j’ai suivi une formation multi-échelles, je suis intéressée par le paysage, notamment le style de Gilles Clément – paysagiste. On peut dire que ces références ont participé à la construction de ma propre pensée d’architecte.

Urbanisme et aménagement du territoire

  1. En tant que spécialiste, que pensez-vous des choix d’aménagement de vos villes?

A Madagascar, les plans d’urbanisme des grandes villes datent des années de l’indépendance, 1950, 1960. On fait des aménagements certes mais il n’y a pas vraiment de cohérence urbaine faute de plan d’urbanisme  à jour. Par conséquent, on assiste à une explosion urbaine, comme le cas de la ville de Tamatave : la population ne cesse d’augmenter, les quartiers spontanés se multiplient, les axes routiers sont toujours engorgés, l’eau stagne un peu partout dans la ville faute d’assainissement, les ordures sont ingérables…C’est le désordre urbain. D’où l’intérêt d’élaborer un master plan pour gérer le développement de la ville.

  1. Qu’entend-on par master plan? et c’est quoi un comité de développement ?

Face à cette explosion urbaine que connait la ville de Tamatave ces dernières années, des citoyens, acteurs de la ville ont pris l’initiative de se rassembler afin de trouver des solutions et d’agir pour la ville.D’où la création du Comité de Développement de la Ville de Tamatave. C’est un comité qui rassemble des opérateurs économiques de la ville. Ce comité est en partenariat direct avec la communauté urbaine, c’est-à-dire : le comité gère les projets de développement avec la commune que ce soit financièrement ou techniquement parlant. Le comité s’est rendu compte que les projets de développement ne seront durables que quand ils sont assis sur une base solide, qui leur donnera une bonne cohérence et une bonne efficacité. Cette base est le fameux master plan. C’est un document évolutif de planification à long terme. Il établit le cadre et les éléments clés d’un territoire qui reflète une vision claire création et adoption par tous les partenaires dans un processus ouvert. Il s’agît d’un plan de développement urbain, économique, socio-culturel et environnemental. En tant qu’architecte je sais que c’est le seul moyen de s’en sortir et tant que citoyenne de la ville j’en suis convaincue.

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    6. Quel premier bilan pouvez-vous faire de cette élaboration du master plan ?

En fait, nous sommes encore à la phase de réflexion sur la stratégie d’élaboration à adopter, sur la définition du genre d’équipe de travail qu’on veut monter, et sur la manière de faire participer tous les acteurs de la ville. La phase où nous sommes est une phase importante car c’est une première pour la ville de Tamatave, et il ne faut surtout rater cette phase de préparation afin d’assurer le bon déroulement des études et surtout d’assurer l’efficacité du Master Plan.

  1. A quels blocages êtes vous confrontée?

Comme nous sommes encore en phase de préparation, il n’y a pas vraiment encore de difficulté. Après, il y a toujours une divergence de point de vue sur certaines choses vu la différence de formation. Comme c’est moi qui dirige ce projet, j’essaie de relativiser, ce qui n’est pas chose facile mais c’est la seule façon de faire avancer les choses au mieux.

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  1. Quels sont les grands axes du schéma directeur et des projets urbains de vos études?

Nous ne sommes pas encore à ce stade . Ceci dit, en tant qu’architecte j’ai certes mes idées là-dessus mais comme c’est un travail d’équipe, je ne peux pas vous faire part des idées qui n’ont pas encore été discutées et acceptées par l’équipe. Néanmoins, les problèmes que rencontre la ville ont été cités : la surpopulation, les questions de mobilité, assainissement, gestion des ordures. Les grands axes de réflexion s’orienteront vers ces problèmes.

  1. Etes-vous d’accord avec les voix qui s’élèvent pour une réflexion sur de nouvelles formes urbaines en Afrique?

L’état des lieux de l’urbanisme en Afrique qui date de l’époque des indépendances après analyse historique montre du “laisser aller”. Dans toutes les villes africaines, qu’est ce qu’on remarque? Il y a deux logiques urbaines différentes : d’un côté, l’urbanisation pendant la colonisation, avec des tracés bien définis, routes bien larges, des réseaux d’assainissements, la ville occidentale en Afrique lieux de résidences de la classe bourgeoise de nos pays, et de l’autre côté, les quartiers spontanés, sans réseaux viaires, aucun plan d’urbanisme n’est respecté et souvent ce sont des lieux d’habitation des classes moyennes et pauvres. Deux mondes différents, dans une même ville, qui ne communiquent pas. Alors est-ce que je suis d’accord ou pas pour une réflexion sur de nouvelles formes urbaines en Afrique? Je suis pour toute idée pour changer cette situation et je pense qu’il ne faut pas se limiter aux nouvelles formes urbaines, il faut penser aux nouveaux modes de vie qui fera des villes africaines des villes durables.

     10. Comment résumerez-vous la situation en termes d’urbanisme dans votre pays?

La situation est juste alarmante. Il est urgent d’agir.

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     11. Jugez-vous important d’associer les habitants aux décisions et aux choix d’aménagement pour leur bien-être? Est-ce toujours le cas à MADAGASCAR?

Nous sommes au 21ème siècle, on revendique partout le développement durable. Une ville durable est une ville où les gens vivent en harmonie, où tout le monde se sent chez lui et s’y sent bien. Il est tout à fait logique que les habitants participent aux projets d’aménagements de chez eux. Ce sont eux qui y vivent, alors il faut qu’ils soient concernés par les décisions et les choix de développement de leur ville afin d’assurer une durabilité. Pour MADAGASCAR ça n’a jamais été le cas. Mais, avec l’élaboration du Master Plan de Tamatave que nous sommes en train de préparer, nous allons essayer de montrer l’exemple au pays entier en espérant un éventuel changement.

12. Face à la poussée démographique avec l’augmentation des besoins en logement, on imagine un changement en cours ou à venir du visage des villes malgaches Cette transformation répond-elle aux aspirations et aux ambitions des populations?

Effectivement, avec la croissance démographique, le changement est en train de s’opérer. Les villes malgaches sont en train de se densifier d’une manière un peu brutale, même s’il a quelques fois des extensions vers les périphéries. En fait, ce sont les habitants qui prennent en charge la transformation de leur ville. Il n’y a pas de plan à suivre, chacun s’implante où il veut. Il n’y a pas de changement imposé par qui que ce soit, c’est la population qui décide suivant son aspiration.

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Rôle de l’Etat

    13. Construire un territoire innovant c’est mettre ensemble un large collectif d’acteurs et d’intérêts divers autour d’enjeux territorialement et politiquement constitué Comment fédérer, qui mobiliser et autour de quels enjeux dans le contexte malgache? Où dans votre ville Tamatave?

Dans un pays sous-développé qui vient de sortir d’une crise politique, je pense que l’enjeu principal c’est la relance économique. Nous avons 22 régions qui ont chacune des ressources naturelles exploitables. Il s’agit de transformer ces ressources naturelles en ressources territoriales, c’est à dire, les penser comme vecteur de développement territorial. Ça c’est l’enjeu principal. Qui mobiliser? Tous les malgaches sont concernés, les gouvernants comme les gouvernés. Il suffit que chacun prenne sa part de responsabilité, et ce sera déjà une innovation. Comment fédérer? C’est la question la plus importante. L’intégrité, le patriotisme, la solidarité et l’envie sont les clés de la réussite d’un territoire. Actuellement, ces valeurs sont en train de disparaître. Il faut que les malgaches se les réapproprient afin qu’ils se motivent pour l’avenir de leur territoire. A mon avis c’est la meilleure façon de les fédérer. Je parle de Madagascar en général, mais cela vaut pour toutes les échelles.

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    14. La planification urbaine est une traduction spatiale d’une vision politique d’un territoire. Quels sont les grands enjeux territoriaux de Madagascar ou/ de votre ville pour les années à venir ?

Pour les années à venir, nous espérons une stabilité politique et une croissance économique du Pays. Pour Tamatave, nous sommes en train de préparer le Master Plan, c’est une planification pour les 30 années à venir. Des enjeux territoriaux seront traités dans ce Master Plan. Je ne suis pas encore en mesure de vous en dire davantage car les enjeux souvent sont tirés d’une fine analyse territoriale; une phase que nous n’avons pas encore entamé mais qui, j’espère, sera bientôt faite et je vous en ferai part avec plaisir.

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 15. L’aménagement du territoire est une démarche à portée opérationnelle plutôt qu’une méthode pré-formatée, elle pose des questions, propose des outils et décrit un protocole d’actions à ajuster à chaque fois par les acteurs eux-mêmes en cours de processus. Quelle serait la réforme structurelle la plus importante à vos yeux pour avancer dans la prise en compte du développement durable?

Je suis sortie d’une formation où le développement durable n’est pas un objectif à atteindre, il fait parti des moyens utilisés pour atteindre un objectif qui est le confort. Le développement durable n’est pas une norme à respecter, c’est une attitude responsable. Nous devons simplement avoir une vision à long terme de chaque chose que nous faisons. C’est ça le développement durable. Alors je pense qu’il n’y a pas vraiment besoin d’une reforme structurelle pour être responsable. Il me semble être intéressant de valoriser l’éducation civique afin d’inculquer cette attitude de durabilité.

   16. Quels sont les pièges dans lesquels il ne faut pas tomber ?

Aujourd’hui, le développement durable est à la mode. C’est devenu une sorte de phénomène. Dans des cas comme ça, souvent on ne sait même pas ce que c’est, ni d’où ça vient, mais comme c’est à la mode alors on suit. Le risque est de ne rien maîtriser et qu’on puisse facilement le rejeter et l’oublier. Comme je viens de le dire, le développement durable est une attitude à adopter.

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    17. Quel rôle pour l’architecte dans ces projets selon vous ?

L’architecte doit être un modèle vivant d’une attitude responsable. Il doit refléter la durabilité dans toutes ces œuvres à travers son intelligence dans les choix qu’il fait même jusqu’aux petits détails.

   18. De nos jours, l’architecture joue un rôle capital pour l’image d’une ville : l’architecture de celle-ci en devient parfois même le symbole. Beaucoup utilisé dans les pays développés, prônant de grands nom d’architectes : où l’architecture devient une œuvre d’art, intrinsèquement lié à un territoire. Quelle devrait être selon vous la relation entre Politique et Architecture dans votre pays?

Dans un pays comme Madagascar où l’architecture est quasiment nouvelle, je pense qu’il faut d’abord laisser du temps à la politique de comprendre ce que c’est que l’architecture et de connaître ses valeurs socioculturelles, artistiques et économiques. Ainsi, on pourrait penser à la relation que les deux peuvent entretenir. Ceci dit, Madagascar est un pays où tout est politisé, il faut juste que l’architecture ne devienne pas un instrument politique.

L’environnement et développement durable

19. Quelle est votre position face à la préoccupation environnementale dans les projets de construction?

La préoccupation environnementale fait partie du souci de développement durable, même souvent on confond les deux. Encore une fois, c’est une question de responsabilité. Un architecte est responsable de ce qu’il propose aux gens et un architecte responsable doit naturellement avoir en lui cette préoccupation environnementale car son métier est de se préoccuper du bien être de ses concitoyens. Ceci dit, même si les architectes et les ingénieurs de construction se tuent pour avoir la haute qualité environnementale, tant que les gens ne respectent pas et ne sont même pas conscients de ce confort fourni, rien ne sera acquis. Tout le monde est responsable de cette planète donc je pense que si chacun est conscient de cela, tout ira bien.

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20. Quels sont alors les grands axes de la stratégie a adopté pour un développement durable et comment inciter les citoyens à changer leurs comportements alors qu’une partie significative de la population est menacée par la précarité?

En Afrique, la pauvreté est trop pesante. Elle empêche toute vision prospective ainsi qu’un développement de leur capacité intellectuelle. Ce qui fait qu’on pourrait passer des années à parler du développement durable mais il n’y aura pas de résultat tangible tant que la population n’y voit pas son intérêt direct. Il faut apprendre à tout le monde à travers la vie quotidienne ce que c’est que le développement durable. Il faut monter des stratégies de cohérence territoriale. Ce qu’il faut savoir est que chaque territoire a sa propre valeur, c’est cette valeur qu’il faut mettre en avant pour l’intérêt des habitants.

  21. Selon vous les collectivités malgaches peuvent-elles s’inspirer des démarches mises en œuvre dans d’autre pays ?

Les malgaches viennent de sortir d’une longue crise politique et nous sommes encore dans une crise économique. Nous voulons s’en sortir mais tout seul nous n’y arriverons pas. Nous avons besoin d’apprendre et de voir ce qui se passe ailleurs. S’inspirer de ce que les autres ont fait ne pourrait être que bénéfique pour nous. Pour le moment, je sais qu’au Comité, nous avons le Master Plan, que nous sommes en train de préparer.

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  22. A quoi doivent se préparer les nouvelles équipes municipales et présidentielles ?

En tant qu’architecte, les nouvelles équipes présidentielles devraient se préparer à un vaste chantier de renouvellement territorial, tout comme les équipes municipales à se mettre à la révision des plans d’urbanisme afin de se redresser.Et en tant que citoyenne, les nouvelles équipes doivent se responsabiliser et responsabiliser les malgaches mais surtout réveiller le patriotisme qui sommeille en nous.

Le retour au pays après 5ans d’études en France…

  21. Quel premier bilan pouvez-vous en faire? A quels blocages êtes-vous confronté ?

Le retour au pays… Après 5ans de vie en Europe, il est évident que c’est difficile de se réadapter. On n’a plus la même vision comme les locaux, divergence de regard, c’est le blocage principal. Le manque de communication sur l’architecture est aussi un point que j’ai remarqué. Rare sont les gens qui connaissent ce que c’est qu’un architecte. Le métier d’architecte n’est pas connu même si ça commence petit à petit à prendre place. Néanmoins, je suis en train de m’adapter à la réalité malgache du monde de la construction, d’apprendre avec un autre regard (sensible, disponible) de la société malgache afin que je puisse bien assurer ma responsabilité. Ceci dit, le bilan est impressionnant car nous avons encore beaucoup à faire et c’est avec plaisir et avec plein d’espoir que j’assurerai mon métier d’architecte ici dans mon pays. “On n’est mieux que chez soi”.

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  22. Quels éléments de changement percevez-vous dans votre environnement socioprofessionnel?

Pendant ma première année, j’ai défendu l’importance d’avoir un Master Plan comme base et guide de développement de la ville. J’avais du mal à faire passer mes idées à cause de la divergence de d’opinion. Mais au bout de quelques mois, les techniciens des services publics, les autorités publiques, les opérateurs économiques ont enfin compris le but du Master Plan. Ils ont commencé à développer une vison à long terme alors qu’avant il ne voyait qu’aujourd’hui. Un changement qui donne de l’espoir. Ils commencent à se responsabiliser en ayant cette vision prospective. C’est le plus important et le reste suivra. Je suis sure qu’ils sauront aussi dire quelque chose sur le métier d’architecte. C’est également une bonne chose pour le développement de l’architecture.

 23. Au delà des aspects institutionnels, quelles sont les grandes évolutions que vous pressentez ?

Particulièrement pour ma ville, la ville de Tamatave, notre équipe travaille pour qu’elle devienne une vraie capitale économique, une métropole innovante, un modèle pour les autres villes malgaches, les villes de l’océan Indien, les villes africaines… Nous y travaillons dure et j’espère que nous y arriverons … En tout cas, nous y croyons.

Engagement  …

 24. Madagascar est entrain de réécrire les pages de son avenir. Avez-vous déjà participé à des débats, tables rondes, conférences ou colloques sur le rôle des architectes dans le développement de votre pays? (si oui, vos impressions sur ces rencontres). Si non un appel à lancer…

Je n’ai pas encore participé à ce genre de sensibilisation et je tiens à profiter de cet entretien pour faire appel à mes collègues architectes : nous sommes encore très peu à Madagascar, certes, mais nous pourrions faire entendre nos envies et nos idées. Il faut qu’on se soude pour convaincre nos compatriotes de voir l’architecture non pas seulement comme un art de construire mais comme un vecteur de développement de notre cher pays fatigué par la crise.

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Mot de fin

 Quelle est votre opinion sur les enjeux auxquels doit se concentrer la jeunesse africaine et particulièrement malgache actuelle?

La jeunesse africaine a de la chance. Elle a le temps et les divers outils nécessaires pour construire l’Afrique de demain. Il suffit d’avoir la volonté, le courage et la capacité de relever ce défi. Cependant, attention à ne pas se tromper dans le choix et la manière d’utiliser ces outils : ça s’apprend, ça se maîtrise et ça se partage. Ceci dit, tout part du sens de responsabilité. Tant qu’on se sente responsable, on ne perd pas l’essentiel : “construire un monde meilleur”.

Que pensez-vous de l’initiative  de www.archicaine.org  qui vise à faire la promotion des architectes Africains et les rapprocher de la diaspora pour susciter des commandes ?

Nous sommes à une époque où on ne peut plus se passer de la communication pour réussir quelques choses. Moi personnellement, je tiens à féliciter et surtout remercier toute l’équipe de ce webmagazine pour l’envie et l’initiative de faire connaître le métier d’architecte au monde africain. Nous savons très bien que ce métier n’est pas encore reconnu en tant que tel en Afrique. Ce genre d’initiative permettra de faire évoluer les choses en permettant aux architectes de se faire connaître, d’avoir de l’espoir et en même temps de permettre aux gens d’avoir plus de connaissance sur l’architecture et de s’y intéresser finalement.

Je vous remercie.

Mémoire master I Elodie SELAMANANA  sur archicaine   http://archicaine.org/les-manifestations-de-la-nature-dans-les-villes-malgaches/

Pour contacter Elodie SELAMANANA   smeldi9@yahoo.fr

Interview réalisée par Steve Nicoué KOTEY Architecte DE  archicainemag@gmail.com

 

nicouer@yahoo.fr

Architecte diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble, Consultant en Innovation, Steve est le fondateur et directeur de publication du webmagaine archicaine.

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2 COMMENTS
  • BARBOLOSI Claude 3 juin 2018

    Bonjour
    Tout le monde connait la difficulté que représente,à Madagascar, l’établissement d’un titre de propriété en bonne et due forme, et personne n’est à l’abri de la corruption qui sévit dans les services fonciers
    Avant toutes réformes il faut impérativement établir une carte fonciére précise, immuable, donc infalsifiable et vous avez maintenant la chance de pouvoir le faire ou de pouvoir l’exiger du gouvernement grâce à la technique du blochchain dont le GHANA est un très bel exemple!!!!
    Salut amical à tous

  • Michael CHEDJOU TALIEDJE 27 décembre 2018

    Bonjour il est vrai et très évident que que le tissus urbain et le paysage architectural de Madagascar doit être revisiter de fond en comble.mais a mon avis cette situation de précarité est un gros avantages car il s’agira d’opéré des opérations nouvelles, des travaux neuf .bien que cela pourrait entrainer des délogement. il est clair qu’une étude de fond doit être fait.pour éviter les solution cosmétiques

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