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Interview Audrey Atchade étudiante Paysagiste

La profession d'architecte paysagiste est peu connue du grand public et est souvent victime d’amalgames. Sa définition n’est pas forcement très figée, ni même reconnue comme le métier d’architecte. Dans la suite de notre dossier

La profession d’architecte paysagiste est peu connue du grand public et est souvent victime d’amalgames. Sa définition n’est pas forcement très figée, ni même reconnue comme le métier d’architecte. Dans la suite de notre dossier sur le métier de Paysagiste il nous a semblé légitime de prolonger notre investigation en interrogeant les principaux acteurs de cette discipline : ces jeunes futurs paysagistes dont l’Afrique a besoin pour valoriser ses territoires. Archicaine s’intéresse à la jeunesse, car cette jeunesse a soif d’apprendre, d’apporter sa touche innovante en phase avec les questions de son époque tout en tenant compte des réalités du terrain. Rencontre avec une jeune femme qui veut à travers ses travaux apporter des idées d’amélioration au cadre de vie des populations et mettre en valeur le paysage béninois. Étudiante en Master 2, option Paysage, pour un  diplôme d’Etat de paysagiste (DE ou DPLG ), elle nous parle de son futur métier, son parcours et de sa volonté de finir sa formation en confrontant  ses techniques et méthodes d’analyse de conception sur un territoire africain. Pas n’importe lequel, un choix de cœur : Cotonou (Rep du BENIN) .

Audrey Atchadé, a 23 ans, elle est née à Pau dans le sud ouest de la France.

Quel cursus scolaire avez-vous suivi pour arriver à cette profession ?

J’ai tout d’abord effectué un Bac Littéraire option Arts plastiques. Cette formation m’a permis de développer mon univers personnel et de m’ouvrir à l’art dans sa grande diversité. Puis, après mon Bac Littéraire je suis rentrée en (CPGE) École Normale Supérieure en design et création industrielle. Cette classe préparatoire de l’École Normale en deux ans n’est pas très connue. Elle est pourtant extrêmement enrichissante. Elle m’a permis de toucher au design d’objet, d’espace, graphique aussi  de poursuivre la philosophie et l’histoire de l’art. Cette formation pluridisciplinaire m’a permis de passer le concours de l’ENSP-V qui est l’École nationale supérieure du paysage de Versailles. Et à présent me voilà ici à parler de ma profession de paysagiste .

Qu’est ce qui vous plaît et pourquoi avoir choisi ce métier ?

Petite, je voulais rentrer en Architecture d’intérieur aux arts décoratifs de Paris. La conception de l’espace m’a toujours attiré. Après la lecture  de nombreux ouvrages en lien avec l’urbanisme, le paysage j’ai vu  développer mon intérêt en  année préparatoire pour le paysage. Par la suite, j’ai eu de nombreux retours positifs sur mon école.J’ai tenté le concours et aujourd’hui je suis heureuse de mon choix. C’est un métier qui embrasse de nombreuses problématiques : environnementales, urbaines, sociales, politiques. C’est un domaine très enrichissant.

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Pouvez-vous nous expliquer en termes simples en quoi consistera votre futur travail ?

Mon futur métier consistera à rendre votre quotidien plus agréable. A dessiner des parcs, des quartiers, des villes accessibles à tous, esthétiques. Des villes en accord avec notre temps et durables dans le futur.Mon futur métier est à la croisée de plusieurs domaines comme l’architecture, l’urbanisme, l’écologie.Toutefois, nous sommes très peu connus en France. Cela est très différent dans d’autres pays européens comme l’Allemagne, le Danemark, la Suède qui sont très sensibles aux problématiques environnementales et qui reconnaissent le paysagiste au même titre que l’architecte, l’urbaniste etc. Le problème est qu’en France, le titre de paysagiste n’est pas protégé. Peuvent s’appeler paysagistes des personnes n’ayant pas  un bac+6 mais un BTS par exemple ou tout autres formations liées au jardin. C’est pourquoi seul le titre de DPLG protège nos années d’études. C’est de là que vient l’amalgame entre paysagiste et jardinier par exemple. Souvent on me demande si je vais planter des arbres, creuser les fosses, niveler. Cela est un autre métier. Nous ne savons pas conduire des engins de chantiers par exemple. Les paysagistes sont des concepteurs donc nous dessinons les espaces au même titre que l’architecte. Nous travaillons en plan, coupes, perspectives, maquette et par contre nous allons faire des suivis de chantier afin de veiller à ce que le projet se réalise comme  sur le papier. Je dirai juste que le paysagiste a un large choix d’échelles, on nous enseigne à passer du très grand paysage au petit détail et inversement. Nous pouvons travailler à l’échelle du jardin, du square ou encore à l’échelle d’une ZAC, d’une ville mais aussi à l’échelle d’une région pour penser l’implantation de ligne TGV, d’éoliennes et de grand projets pouvant affecter le paysage.

Quels sont pour vous les qualités premières que doit avoir un architecte paysagiste ?

L’altruisme car nous dessinons avant tout pour les gens. Ensuite, je dirai qu’il faut être sensible à ce qui nous entoure. Enfin, la diplomatie car ,à mon sens, nous avons souvent un rôle de médiateur.

Image aérienne ville de Cotonou BENIN

Pour votre projet de fin d’étude quel sera le sujet  et pourquoi avez-vous décidé d’aborder cette thématique ?

Je reviens d’un voyage d’un mois à Cotonou.La ville natale de mon père. Je compte faire mon diplôme de fin d’étude sur cette dernière et me questionner sur le sujet de la résilience de Cotonou face à ses eaux et leurs dynamiques spécifiques (Océan, lagune, Lac). Mon père est originaire de Cotonou. Il m’a souvent parlé de cette Ville qui pour moi sonne comme un ailleurs. J’y suis allée petite mais je n’en ai aucun souvenir. Le Bénin est un petit pays certes mais avec une grande histoire , une richesse culturelle très importante mais pourtant autour de moi peu de gens le connaissent. Pourquoi ? Voilà ce qui a été mon point de départ, l’envie de le faire découvrir.Puis, mon retour au Bénin après 21 ans m’a permis de me faire ma vision. J’ai découvert une autre culture, d’autres paysages. Le Bénin est peu mis en avant. Son potentiel paysager n’est pas affirmé. Je pense qu’une stratégie urbaine adaptée mettant en valeur l’Océan, la lagune et le Lac pourra offrir un vrai souffle à la ville et la reconnecter avec les éléments naturels qui l’entourent.

interview-audrey-atchade-etudiante-paysagiste -4Photo Cotonou (c) Audrey Atchade

Un projet de fin d’étude, un retour au pays d’origine après 21 ans vos sentiments ?

Il en découle beaucoup de rencontres, de retrouvailles, de souvenirs. Je suis heureuse de finaliser mon cursus avec un projet aussi personnel.

interview-audrey-atchade-etudiante-paysagiste -8Photos Ganvié BENIN (c) Audrey Atchade

Quels sont les premières observations et hypothèses qui se dégagent de vos analyses de documents et de votre visite de terrain ? Selon vous, à quelle problématique précise vos travaux peuvent-ils répondre ?

Un grand projet d’aménagement tente de voir le jour «  la Route de la pêche » . J’espère qu’il ne se fera pas comme écrit sur le papier. Je pense qu’ aujourd’hui nous pouvons penser à un nouveau type de tourisme sans réitérer les erreurs passées et ce afin de permettre une complète appropriation de la ville par ses habitants sans privatiser le littoral et certaines zones « touristiques ».

Steve Kotey : En plus pour moi ancien habitant de cotonou la plage reste le seul espace de détente,de loisir pour la population en absence de parc et autres espaces végétalisés dans la ville,sans parler des familles de pêcheurs qui habitent sur ces espaces.

 

Projet de la route des pêches du gouvernement du BENIN Source  http://routedespeches.com

Votre sujet a t-il un lien avec l’architecture, l’urbanisme, l’environnement et le développement durable en Afrique ?

Oui l’ensemble de ces domaines. Le paysage les englobe et ne peut s’en détacher. D’ailleurs, à Cotonou avec les problèmes d’érosion, de pollution, de structure urbaine en attente etc comment ne pas aborder ces domaines ?

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Des conseils pour les étudiants qui envisagent de se lancer dans un cursus comme le votre pour être paysagiste?

De la passion, de la détermination et du temps. L’École devient vite votre maison.

Comment résumerez-vous la situation en termes d’urbanisme en Afrique et au Bénin en particulier?

Je souhaite qu’en Afrique, les décideurs politiques et les spécialistes en aménagement arrivent à mettre en valeur le savoir-faire propre au contexte africain,ses techniques architecturales,artisanales,ses paysages et ses patrimoines qui sont en lien avec la culture. C’est en affirmant ses propres atouts  que l’Afrique pourra réussir un développement durable.

Archicaine vous accompagne, mais faire un projet d’étude sur l’Afrique n’est souvent pas facile en terme de documentation où en êtes vous ? Un appel à lancer ?

J’ai des bases et des contacts. Mais bien sur d’autres documents seront toujours utiles !

Quelle est votre opinion sur les enjeux auxquels doit se concentrer la jeunesse africaine et particulièrement béninoise actuelle?

La jeunesse fait déjà des choses. Des associations, des sites internet « visiterlafrique.com » « Archicaine » « Roots » « la bledardise » etc naissent et se développent. A eux seuls ils montrent l’Afrique différemment. La jeunesse, c’est à dire nous. Nous devons juste faire ce que nous avons envie de faire. Voyager, écrire, lire, se documenter sur ce qui nous entoure. Nous n’avons pas de poids particulier selon moi. La jeunesse n’a pas plus à faire que les autres. Mais il est important de se faire confiance, de suivre ses envies et de tout faire pour les faire se réaliser.

Une chose, je ne veux plus entendre des jeunes béninois «  Ici,nous n’avons rien ». Parfois, il faut simplement apprendre à regarder autrement.Ailleurs ce n’est pas rose non plus…

Mots de fin

Bravo à www.archicaine.org  de révéler l’architecture africaine. Allons encore plus loin tous ensemble.

Merci du courage à vous et à bientôt pour la publication de votre projet de fin d’étude…

Interview réalisée par Steve Nicoué Kotey Architecte DE

Lire l’article  à la découverte du métier de paysagiste http://archicaine.org/a-la-decouverte-du-metier-de-paysagiste-avec-audrey-atchade/

nicouer@yahoo.fr

Architecte diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble, Consultant en Innovation, Steve est le fondateur et directeur de publication du webmagaine archicaine.

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1 COMMENT
  • Rokiath ALAO FAARI 31 mars 2023

    Vraiment votre parcours m’a beaucoup ouvert les yeux ,je suis étudiante en licence 3 de géographie et Aménagement du Territoire et moi je suis en train de préparer mon mémoire qui tourne autour de la dynamique des espaces verts dans la ville de porto Novo .Je ne sais pas si vous aviez des idées à me donner pour m’accompagner dans cette recherche .

    Merci

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